CCP: CI 03/9 ![]() |
COMITÉ DES PRODUITS |
GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL SUR LES AGRUMES |
Treizième session |
La Havane, (Cuba), 20-23 mai 2003 |
LA PRODUCTION DES AGRUMES A CUBA : CROISSANCE ET PERSPECTIVES DU MARCHÉ |
II. HISTORIQUE DU SECTEUR CITRICOLE CUBAIN
III. RÉORGANISATION DE L’AGRO-INDUSTRIE DES AGRUMES
IV. SITUATION ACTUELLE DE L’AGRO-INDUSTRIE CUBAINE DES AGRUMES
V. PRINCIPALES CONTRAINTES DE PRODUCTION ET SOLUTIONS POSSIBLES
1. Ce document résume l’évolution de la production et du commerce citricole à Cuba, décrit la situation actuelle et examine l’avenir de la citriculture cubaine.
2. La création de l’industrie cubaine des agrumes actuelle a commencé à la fin des années soixante avec l’objectif d’approvisionner le marché de l’Union Soviétique et des pays socialistes d’Europe de l’Est avec lesquels il y avait des relations économiques étroites. A cette époque, la consommation d’agrumes frais dans les pays du bloc socialiste était beaucoup plus basse que celle des pays d’Europe occidentale. Les études de marché effectuées ont montré que ces pays ne consommaient que de très petites quantités d’oranges tropicales fraîches. Le pamplemousse était un fruit pratiquement inconnu, dont il fallait créer le marché. Le Programme National des Agrumes a été lancé avec comme objectif principal l’exportation de fruits frais et la satisfaction de la demande interne.
3. Le Programme National des Agrumes a obtenu de bons résultats. La surface d’agrumes a atteint 115 000 ha. A partir de 1975 la production a augmenté en moyenne de 14 pour cent par an, arrivant en 1990 à 1 017 000 tonnes. A la fin des années quatre-vingt environ 500 000 tonnes de fruits étaient exportées à partir de cinq ports. Plus de 200 000 tonnes de fruits ont été traitées par trois usines de transformation pour la production de jus pour l’exportation. La consommation de fruits par personne est passée à plus de 25 kg par an.
4. Dès le début il a été décidé d’asseoir ce développement sur une base scientifique et technique, à travers la formation du personnel scientifique et la création d’installations qui plus tard ont intégré les espèces fruitières tropicales et constituent actuellement l’Institut de Recherche en Fruticulture Tropicale (Instituto de Investigaciones en Fruticultura Tropical, IIFT). Les agrumes sont devenus l’un des principaux produits d’exportation du pays. Les rentrées annuelles en devises des agrumes s’élevaient à près de 180 millions de pesos (le peso cubain était équivalent au dollar des États-Unis). Le potentiel de production était de plus de 3 millions de tonnes environ. L’infrastructure créée et le marché ouvert aux agrumes cubains assuraient la persistance du rythme d’accroissement atteint.
5. La disparition soudaine du marché des pays du bloc socialiste a provoqué de grandes pertes pour l’économie cubaine. La production a diminué au moins de moitié en 1994. La crise des agrumes s’inscrivait dans une crise économique généralisée à tout le pays par la disparition inattendue du marché de l’Union Soviétique et des autres pays socialistes européens, ensemble économique dans lequel Cuba avait intégré une part importante de son économie.
Production et destination des agrumes de Cuba 1958-1994
6. En 1994 plus de 50 pour cent des surfaces cultivées en agrumes avaient déjà disparu et le reste était en mauvais état. Il était indispensable de faire de grands changements pour sauver la production d’agrumes existante. En premier lieu, il fallait réorganiser les agrumes de la vente en frais vers la transformation industrielle. Ceci impliquait la reconstruction et l’agrandissement des usines de transformation, la réhabilitation des plantations, l’augmentation des rendements et la réduction des coûts. Toutefois, Cuba ne disposait pas du capital nécessaire ni des circuits de commercialisation sur le marché international.
7. Les mesures fondamentales prises pour la réorganisation furent :
8. À partir de 1996, la reprise de la production agrumicole à Cuba a commencé à se dessiner, tel qu’on peut le voir dans le Tableau 1. La production en 2000 a atteint 87 pour cent de la production record de 1990 avec des surfaces diminuées de moitié et des coûts de production plus faibles.
1995/96 | 1996/97 |
1997/98 |
1998/99 |
1999/2000 |
2000 | |
Production totale |
564,4 |
795,1 |
658,9 |
739,3 |
730,5 |
892,4 |
Industrie |
366,5 |
527,1 |
478,8 |
599,9 |
620,3 |
675,3 |
Fruit frais |
48,7 |
54,2 |
38,6 |
32,9 |
31,0 |
29,6 |
Consommation locale |
149,2 |
213,8 |
141,5 |
106,5 |
79,2 |
187,5 |
9. En novembre 2001, le cyclone Michelle, de catégorie IV avec des vents soutenus à plus de 200 km/heure, s’abattit sur la partie centrale du pays provoquant des pertes énormes surtout à la plus grande plantation d’agrumes du pays (Jagüey Grande) où près de 400 000 tonnes de pamplemousses et d’oranges furent détruites, et les feuilles des arbres de 20 000 ha de cultures endommagées. À un degré moindre le cyclone affecta toutes les plantations des provinces centrales et de Isla de la Juventud. En 2002, deux cyclones suivant presque le même cours, se sont abattus en un intervalle de deux semaines sur la Isla de la Juventud et Pinar del Río, provoquant de grands dégâts.
10. Ce fut la pire incidence cyclonique dans toute l’histoire des agrumes cubains. Les cyclones ont affecté non seulement la campagne 2001-2002 mais aussi celle 2002-2003. Si les plantations n’avaient pas été dévastées par trois cyclones en douze mois, la production serait d’un million de tonnes en 2002-2003.
11. Toute l’agro-industrie des agrumes est organisée au sein du GEF qui opère sous la responsabilité du Ministère de l’Agriculture. Le GEF inclut, en plus, plusieurs exploitations fruitières non agrumicoles, une entreprise de production de fleurs et plantes ornementales, une entreprise import-export qui gère aussi le réseau d’installations frigorifiques et d’autres services (Cítricos Caribe SA), une entreprise commerciale de fruits et légumes et l’IIFT qui fournit la base scientifique et technique du système fruitier cubain. Actuellement il y a environ 27 000 travailleurs liés à cette branche.
12. Le GEF comprend deux circuits d’exportation :
13. Toutes les exportations se font par l’entreprise Cítricos Caribe SA qui possède trois chambres froides et réalise les exportations par les ports de La Havane, Cienfuegos, Santiago de Cuba et Nuevitas.
14. Par ailleurs, l’usine de transformation de Pinar del Río qui est une entreprise mixte formée par du capital italien et l’entreprise Cítricos Caribe SA, est approvisionnée par quatre entreprises agricoles du Grupo. Cette usine exporte directement.
Agro-industrie
cubaine des agrumes
(les chiffres indiquent la superficie en ha)
15. Les oranges et les pamplemousses sont les espèces prédominantes et constituent ensemble environ 95 pour cent de la production. Les quantités produites sont presque identiques, bien que les oranges représentent 69 pour cent de la surface totale et les pamplemousses 30 pour cent. Les autres produits sont les limes et les citrons, les mandarines et les hybrides.
16. La variété d’orange la plus cultivée est la Valencia. Quelques exploitations ont des variétés d’oranges à maturation précoce, Navel et China, mais sans importance quantitative dans la production. La destination de ces oranges précoces est la consommation locale en raison de leur faible teneur en sucres qui les rend inaptes à la transformation en jus.
17. La variété principale de pamplemousse est le Marsh, dont la plus grande partie est destinée à la transformation. La variété Ruby Red est importante pour les entreprises Jagüey Grande, Ceiba et Isla de la Juventud et pour l’exportation comme fruit frais. A partir de 1992 des variétés de pamplemousse très colorées ont été introduites. Ce fut d’abord environ 100 ha de Star Ruby à Jagüey Grande en 1992 et aujourd’hui l’augmentation des surfaces cultivées en variété Río Red continue.
18. Parmi les fruits acides, on cultive surtout la lime Tahiti. La lime mexicaine est pratiquement limitée à l’entreprise Banes et toute la production est destinée à l’extraction d’huile essentielle. De nombreuses entreprises cultivent de petites parcelles de mandarines et d’hybrides.
19. Depuis l’année 2000, Cuba produit et exporte des jus simples et concentrés d’agrumes certifiés biologiques. Les fruits biologiques ne sont pas exportés pour le moment.
Tableau 2 – Production de fruits et de jus biologiques
Production (t) |
2000-2001 |
2001-2002 |
Oranges
|
4 060
|
2 767
|
20. La production biologique a commencé dans le système de polyculture de Baracoa, dans l’extrémité orientale du pays, en profitant de la production de pamplemousses qui poussaient dans les plantations de cocotiers, café et cacao auxquelles on n’appliquait pas de produits chimiques. Quelques plantations qui durant plusieurs années n’ont pas reçu de produits chimiques à cause de la situation créée par la disparition du marché socialiste ont été incluses dans le système.
21. L’ouragan Michelle en 2001 a provoqué de graves dommages à la récolte 2001-2002, et a affecté également la production 2002-2003 des plantations de La Havane, Matanzas, Cienfuegos et Ciego de Avila.
22. En 2000, la conversion à l’agriculture biologique de trois plantations commerciales d’environ 350 ha a commencé à La Havane, Ciego de Avila et Cienfuegos. La production biologique est confrontée à plusieurs problèmes :
23. En dépit de ces problèmes, cette initiative a obtenu des résultats prometteurs. Les jus d’orange biologiques ont été très bien acceptés. Ceux de pamplemousse ont d’abord rencontré des difficultés de commercialisation qui ont ensuite été résolues. Les prix de vente sont attractifs et la demande est supérieure à l’offre. Il a été décidé de convertir une plantation de 69 ha en bonnes conditions et qui a connu un rendement de 20 t/ha. Jusqu’à présent des plantations de rendements inférieurs avaient été utilisées.
24. Les plus grandes améliorations faites pendant ces dix dernières années ont été la reconstruction et l’agrandissement de la base industrielle existante et l’amélioration considérable de son fonctionnement jusqu’à obtenir de très bons niveaux, comparables aux niveaux internationaux. En plus des quatre usines de transformation existantes en 1990, deux usines se sont ajoutées, l’une à l’est du pays et l’autre à l’ouest, ce qui permet de transformer les fruits de tout le pays dans un rayon moyen de moins de 100 km.
Usines de |
Transformation de fruits en 2000 (t) | ||||
Oranges |
Pamplemousses |
Limes |
Total |
% | |
Pinar del Río |
39 723 |
39 723 |
6 | ||
Jagüey Grande |
158 488 |
252 392 |
410 880 |
61 | |
Isla de la Juventud |
30 767 |
30 767 |
5 | ||
Ceballos |
65 000 |
71 568 |
1 195 |
137 763 |
20 |
Contramaestre |
42 744 |
8 396 |
51 932 |
8 | |
Banes |
5 027 |
5 027 |
1 | ||
Total |
266 232 |
402 053 |
6 223 |
675 300 |
100 |
% |
39 |
60 |
1 |
100 |
|
25. Les fruits frais exportés proviennent de quatre entreprises productrices : Jagüey Grande, Arimao, Ceiba et Isla de la Juventud.
26. Cítricos Caribe SA exporte annuellement environ 500 000 cartons (60 pour cent oranges, 33 pour cent pamplemousses, 7 pour cent lime Tahiti), soit à peu près 8 000 tonnes de fruits provenant des entreprises Ceiba et Arimao. Le marché principal de ces exportations est la Communauté Européenne. L’entreprise de Jagüey Grande exporte chaque année environ 20 000 tonnes de pamplemousses et oranges en frais surtout vers la Communauté Européenne. La Isla de la Juventud exporte environ 1 000 t/an de pamplemousses.
Produits transformés (t) – années 2000 et 2001 | |||||
Total |
Orange |
Pamplemousse |
Mandarine |
Lime | |
Année 2000
Jus concentrés congelés Année 2001 Production totale Jus concentrés congelés Exportation Jus concentrés congelés |
66 320
61 323,3
|
26 431,9
35 366,4
|
25 051,6
15 851,6
|
295 295 84,6
|
59,7 36,3 131,3
|
27. L’approvisionnement du marché local en fruits frais produit par le système du GEF pendant l’année 2000 fut de 124 500 tonnes auxquelles s’ajoutent 60 000 tonnes produites par le secteur privé dispersé. Cette quantité représente une consommation annuelle d’environ 15 kg par habitant. Une partie de cette production est distribuée à la population à très bas prix. Le reste se vend sur les marchés agricoles selon les prix déterminés par l’offre et la demande. En plus de la consommation par la population, le tourisme consomme par année environ 8 000 tonnes. Le marché intérieur, surtout l’industrie des aliments et le tourisme, consomme chaque année 7 pour cent de la production nationale, soit à peu près 4 000 tonnes de jus et d’autres produits transformés.
28. Du même que pour toutes les régions agrumicoles de la Caraïbe, dont la plupart des plantations sont sur bigaradier, la production cubaine d’agrumes se trouve menacée par la propagation de souches sévères de la tristeza des agrumes. Bien que l’aphide brun se trouve à Cuba depuis 1993, la mort massive des arbres qui généralement accompagne cette situation ne s’est pas produite.
29. Il y a un programme de suivi de la maladie depuis très longtemps et les mesures prises ont eu une influence positive jusqu’à présent. De la même façon, toutes les conditions existent pour remplacer les plantations sur oranger amer par des plantations sur porte-greffes tolérants, avec des greffons certifiés et à haut potentiel de production. Le remplacement se fait sur des porte-greffes tolérants à la tristeza, avec un matériel de multiplication certifié, une densité de semis plus grande et une technologie qui assure un meilleur rendement que les plantations actuelles à des coûts de production inférieurs. Le problème essentiel est économique.
30. La manque de ressources financières suffisantes empêche jusqu’à présent d’accélérer le remplacement des surfaces actuelles par des plantes tolérantes à la tristeza des agrumes, avec une plus grande densité et un potentiel productif. Ce changement est essentiel pour maintenir l’agro-industrie cubaine des agrumes et améliorer sa compétitivité.
31. Cuba possède les conditions nécessaires à un agrandissement considérable de l’industrie des agrumes sur une base économique compétitive sur le marché international.
32. La stratégie actuelle est d’augmenter les rendements pour maintenir la production à environ un million de tonnes par an et planter 30 000 ha à haut potentiel de rendement sur des porte-greffes tolérants à la tristeza dans un bref délai pour remettre la capacité productive existante sur de meilleures bases phytosanitaires et économiques.